Non, les lavandières ne sont pas des vipères! 


Les lavandières sont inquiètes! La fontaine aux vipères a été restaurée dans les hauteurs d'Ornans! L'un des plus beaux lavoirs de France a été restauré ces dernières années: celui que Gustave Courbet nomma La fontaine aux vipères pour titrer l'un de ses tableaux! Un magnifique tableau ensoleillé qui offre une superbe vue de la vallée de la Loue! Une vue mielleuse à souhait de la vallée! Qui forme un joli contraste avec une vue quasi identique de la même vallée par temps d'orage!


La vallée de la Loue par temps d'orage de Gustave Courbet
La vallée de la Loue par temps d'orage de Gustave Courbet

Apparemment, autour de ce lavoir, si on doit en croire Courbet, les langues des lavandières étaient bien pendues, actives et venimeuses. Les lavandières ne gardaient pas leur langue dans leur poche et pouvaient se défouler à loisir sur le linge sale avec leurs battoirs, joignant ainsi le geste à la parole. Peut-être pas au point de qualifier de "croûtes" les toiles du maître d'Ornans, mais sait-on jamais! Depuis, de l'eau a coulé sous le pont de Nahin et sur les plumes des canards, les lavandières ont mis beaucoup de miel dans leur bouche, et sont devenues de véritables couleuvres, d'où leur inquiétude légitime! Se pourrait-il que la restauration du lavoir englouti les rende à nouveau vipérines à souhait? Caustiques, ironiques et sarcastiques? Il n'est jamais agréable d'être pris pour ce que l'on n'est pas à moins d'être un Tartufe!


La fontaine aux Vipères

Pas des fables! Plutôt des propos domestiques,

Prosaïques! Des commérages et cancans!

Des potins! Cela seul, près du château d'Ornans,

Courbet se plaisait à entendre! Fantastique  

 

La vue offerte par la fontaine aux Vipères!

La vallée de la Loue, la petite cité

Comtoise et le vaste ciel sont plébiscités

Par les poils du pinceau quand la magie opère! 

 

Tout est miel doré! Tout est louange emmiellée  

Dans le portrait ensoleillé du vieux lavoir! 

Ruminaient les vaches autour de l'abreuvoir!

L'endroit ne nécessitant pas des Propylées!

 

Courbet a immortalisé hommes et femmes. 

Lavandières aussi, en passant, il a peint,

Mais toujours d'assez loin: on ne peut voir leurs seins

Penchés sur l'eau! N'en résulta un psychodrame: 

 

Un jour vint l'abandon, la ruine qui appelle

Le corps à corps pierreux de la végétation! 

Ronce, lierre, oubli et mousse entrent en action, 

Ensevelissent les rires et les chapelles. 

 

Toujours plaquée au sol la pierre de taille 

Pendant que les ronciers triomphent! Le décor

Leur appartient! On redécouvre le trésor:

Autour du bassin on arrache les broussailles! 

 

Fini, fontaine, la lutte gréco-romaine! 

Le lavoir est aussitôt désigné vainqueur! 

L'abreuvoir restauré retrouve des couleurs! 

Le petit patrimoine n'est plus à la traîne!

 

Le serpent me fait toujours penser à la fable:   

Il aime revêtir une nouvelle peau!

Il aime également ramper, glisser sur l'eau

En quête de saillies, de pointes mémorables. 

 

Eaux lucides! Ô clairvoyantes lavandières!

Vous n'êtes pas revenues au bord cependant  

Avec vos blancs savons, avec vos fronts savants,

Avec vos langues bien pendues et vos prières.