Je suis un lointain cousin du peintre Gustave Courbet. Mon arrière grand-mère maternelle était en effet une fille Corbet du village de Bolandoz dans le Doubs, situé à côté de Flagey, le village de la branche paternelle de Gustave Courbet. Les fermes Courbet et Corbet se touchent d'ailleurs à vol d'oiseau et ne sont séparées que par des prairies. Il est fort probable et même avéré qu'une voyelle baladeuse (en l'occurrence un u) se soit égarée ou invitée dans les registres de mairie. Il est vrai que Courbet, cela sonne mieux que Corbet! La sonorité est plus douce et plus ronde!
Outre un lointain cousinage, Gustave Courbet et moi partageons surtout un amour du même pays, un pays qui porte d'ailleurs désormais son nom, un pays marqué géologiquement par son relief karstique et ses vallées, et dont le centre est la petite ville d'Ornans. Nous sommes tous les deux habités, hantés, voire irrigués, par les vallées de la Loue et du Lison, ce qui ne nous interdit pas de faire l'école buissonnière pour les besoins de la cause. J'ai grandi pour ma part en Provence, si bien que le pays de Courbet est pour moi une terre maternelle plutôt qu'une terre natale, et fut surtout un lieu de vagabondage estival dans ma jeunesse. La Loue et le Lison coulent néanmoins dans mes veines, et forment avec leurs vallées le coeur de mon oeuvre littéraire et poétique. Ou, du moins, le coeur d'une partie non négligeable de mon oeuvre littéraire et poétique.
C'est en effet dans le pays de Courbet que je situe l'action du tome 4 de mon premier recueil de fables, l'action des deuxième et troisième recueils de fables, l'action d'un recueil de poèmes intitulé Les Rafraîchissements (sur lequel je ne travaille guère pour le moment à dire vrai), le poème La Ceinture enchantée consacré aux baignades en rivière qui fera partie du recueil de poèmes Les Baigneuses, ainsi qu'un recueil de textes poétiques divers et variés (journaux, poèmes, proses diverses) s'inspirant des écrits d'Archibald Olson Barnabooth, le fameux personnage de Valéry Larbaud.
Les paysages et sites naturels de ces deux vallées travaillent d'autant plus mon imagination que Courbet a déjà gratifié la plupart d'entre eux de représentations picturales. J'ai visité à maintes reprises la plupart des lieux que Courbet a peints, et je connais également les merveilles qu'il a oublié de peindre ou n'a pas tenu à peindre. Mon univers poétique est principalement situé autour du village de Lizine, à la confluence de deux rivières, La Loue et le Lison, et dans les parages des confluences de ces deux rivières avec deux ou trois autres ruisseaux: La Brême, le ruisseau d'Amondans, la Goulue, le Conche ou ruisseau du Todeur, pour ne pas citer la source du Lison et les environs de Nans-sous-Sainte-Anne.
Ceci dit, je suis à cent lieues d'être un auteur de terroir. Je ne cherche pas à décrire la vie des Francs-Comtois ou les coutumes franc-comtoises. Je ne suis pas un Henri Vincenot du Doubs. J'ai grandi non seulement en Provence, dans le sud de la France, mais j'ai vécu aussi à l'étranger. Je suis un familier des bords de la Méditerranée, et l'Angleterre est le pays d'Europe que je connais le mieux après la France. J'ai vécu également une quinzaine d'années en Gascogne. Comme Courbet, j'ai passé beaucoup de temps hors du vallon, et je ne crois pas que ce fut du temps perdu. Le monde antique, la Grèce et l'Italie jouent aussi un rôle prépondérant dans ma poésie.