La pénurie mondiale annoncée en eau, dont s'inquiètent les Nations-Unies, ou un étiage très sévère du ruisseau où coule une onde pure non polluée, pourraient-ils être la cause réelle de l'agacement du loup? Se pourrait-il que ce loup ait plus soif que faim? Se pourrait-il que ce loup soit plus soucieux de conserver pour son usage la précieuse ressource en eau que de dévorer l'agneau? La lecture de la fable peut ouvrir la porte à une telle interprétation.
Les lavandières, qui sont habituées à troubler l'eau de leur lavoir, en débattent aujourd'hui autour du lavoir. Et ce n'est pas un hasard non plus si les Fables du Lavoir mettent à l'honneur l'eau fraîche et pure des rivières! Pour mémoire, voici la fable Le loup et l'agneau de La Fontaine, accompagnée en vis-à-vis du pastiche que j'ai fait de cette fable, pastiche qui remet les pendules à l'heure!
Le loup et l'agneau
La raison du plus fort est toujours la meilleure:
Nous l'allons montrer tout à l'heure.
Un agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un loup survient à jeun qui cherchait l'aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
"Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage?
Dit cet animal plein de rage:
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'agneau, que Votre Majesté
Ne se mette pas en colère;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né?
Reprit l'agneau, je tette encor ma mère.
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens:
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
On me l'a dit: il faut que je me venge."
Là-dessus, au fond des forêts
Le loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès.
Le loup et l'agneau
La raison du plus faible est toujours la meilleure:
Nous allons le montrer sur l'heure.
Un agneau se désaltérait
Dans le courant d’une onde pure.
Un loup survient à jeun qui cherchait l'aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
"Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage?
Dit cet animal plein de rage:
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'agneau, que Votre Majesté
Ne se mette pas en colère;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je m'en viens nu et tremblant
De ce courant,
Où je m'écoulais de plus belle,
Et que par conséquent, de multiples façons,
J'aurais pu être sa boisson.
- Raison de plus, reprit cette bête cruelle,
Je vois que tu ne tenais pas à m'étancher.
- Mais n'est-ce donc point assez de vous épancher?
Reprit l'agneau, lapé par l'atmosphère.
Je ne puis plus couler par terre.
- Je divague? - Ben, il se pourrait bien:
Car vous ne me voyez plus guère
Et vous devez avoir très faim.
- Il est temps que je déchire tes langes. "
Là-dessus, la brume apparaît,
Cerne le loup, et, fait étrange,
Tout à coup l'agneau disparaît.